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Figeac, des rues et des monuments…
Une ville se raconte… Mais surtout, elle se visite ; et c’est dans ses rues, ses monuments et ses pierres que la ville se dévoile de la meilleure façon. De bonnes chaussures aux pieds, un appareil photo à la main et un esprit curieux en tête ; rien de mieux pour partir à la découverte des lieux.
Nous suggérons au visiteur « étranger », qui sera à coup sûr du « pays » au terme de sa visite (compter deux heures), de suivre les « clefs » de la ville qu’un Office du Tourisme, un jour astucieux, a mis à disposition gratuite de tous – le dépliant touristique étant, lui, malencontreusement payant… La première clef se trouve place Vival, en centre ville.
Quelques faits importants sont à définir avant de se lancer à l’assaut de la ville et de son histoire. Le centre-ville, ou centre historique, de Figeac a l’aspect d’un vaste triangle curviligne dont la base s’appuie sur le cours du Célé et dont les deux autres côtés, bordés d’avenues aménagées sur les anciens fossés, se rejoignent à flanc de colline en un lieu appelé foirail.
Quatre rues, disposées en croix, traversent ce triangle de part et d’autre à partir d’un point central facilement identifiable, la place Champollion ; ce sont la rue de Colomb au nord, la rue Émile Zola (ou rue Droite) à l’est, la rue Gambetta au sud et la rue d’Aujou à l’ouest. Ainsi n’est-il pas possible de se perdre à Figeac sans retrouver facilement son chemin.
Selon notre itinéraire, nous nous rendrons successivement à l’église Saint-Sauveur, à la place de l’Estang, aux places de la Halle et des frères Champollion, à l’église Notre-Dame du Puy, au mur d’enceinte de Saint-Barthélemy, à l’église des Carmes, pour revenir enfin au point de départ. Ceci avec un lot de photographies et de souvenirs de Figeac ; comme il se doit.
La place Vival
Il s’agit d’une place moderne née de l’opportunité au début du XXe siècle. Un immeuble était à vendre ; les maisons voisines menaçaient ruine. Il n’en fallait pas plus pour que la municipalité décidât de raser le quartier tout entier en vue de mieux accueillir ses forains les jours de foire et de marché. Il est vrai que ce quartier, connu localement sous le nom de “lo Tobodio” (la Tabadie), constitué de constructions branlantes et de toits vermoulus, avait fort mauvaise réputation. On le disait habité par les descendants des serfs de l’abbaye…

Ainsi naquit, entre la sous-prefecture et la rue Ortabadial, la place Vival, du nom du maire qui dirigea sa percée. L’hôtel de la Monnaie, construction du XIIIe siècle, qui la borde au sud, faillit du même coup disparaître, les édiles municipaux ayant, dans un premier temps, décidé de ne récupérer que quelques unes de ses pierres… Au sud de la place, il est encore possible d’admirer plusieurs façades à pans de bois de maisons (restaurées) datant de l’époque médiévale.
L’hôtel de la Monnaie
Devenu l’édifice de Figeac le plus admiré, et le plus visité des touristes, l’hôtel de la Monnaie ne fut longtemps, malgré certains vestiges le rattachant aux XIIIe et XIVe siècles, qu’un bâtiment sans âme ni prétention. Il y a cent ans, à peine, on y trouvait encore au rez-de-chaussée une porcherie ; quant au premier étage, là où avaient pu vivre jadis de riches bourgeois de la ville, était entreposé du foin. Si bien que lors de la percée de la place Vival, fut-il décidé, en conseil municipal, d’abattre cette triste masure.
Il fallut alors toute l’opiniâtreté d’un groupe d’amateurs de vieilles pierres, parmi lesquels Jules Malrieu, du syndicat d’Initiative local, pour sauver ce que la population locale appelait par tradition “l’oustal dé lo Mounédo”. Restauré avec soin, en partie reconstruit avec des matériaux récupérés dans l’ancienne mairie de Figeac, l’édifice est à la fois curieux et noble. Curieux parce que sorti de son écrin de maisons anciennes et parce que constitué, en fait, de deux constructions distinctes que sépare un mur de refend ; noble par ses façades, par ses fenêtres géminées ou ternées, par sa monumentale cheminée sarrasine.
La partie méridionale, la mieux préservée (et la plus authentique), borde la rue Ortabadial avec des murs de grès épais, percés au rez-de-chaussée, de quatre arcades à arc brisé, au premier étage d’une série de fenêtres géminées, au deuxième étage d’un soleilho largement ouvert. Les petites ouvertures rectangulaires situées au-dessus des arcades et les oculi, tous différents, dominant les fenêtres rappellent qu’à une époque où l’usage du verre domestique demeurait limité il était important de faire entrer, tous volets clos, la lumière du jour dans les locaux dévolus au travail.
Sur la façade septentrionale, les arcades ne sont plus qu’au nombre de deux, les fenêtres se présentent ternées. D’autres arcades, d’autres fenêtres ouvrent encore les façades latérales. Particularité de l’une de ces façades : la souche de cheminée qui, s’élevant très haut au-dessus d’un toit de tuiles rondes, se termine par une tourelle octogonale, elle-même coiffée d’un clocheton de pierre. Seul point noir au tableau de la restauration magistrale dont a fait l’objet l’hôtel de la Monnaie : le soleilho, trop écrasé, qui devait jadis s’inscrire dans une construction à pans de bois plus humble mais aussi plus harmonieuse.
Ancienne demeure bourgeoise, l’hôtel de la Monnaie, dont on sait pertinemment qu’il n’a jamais été témoin de la moindre fabrication de pièces, d’or ou d’argent, est aujourd’hui Office du Tourisme, chargé de l’accueil annuel de quelque 200 000 visiteurs curieux, en mal de restaurants, d’hôtels ou de monuments.
D’ici part, à heures régulières, le petit train sur pneus que se doit de posséder en son sein toute ville quelque peu touristique ; ici commencent encore diverses visites commentées à thèmes portant sur les églises locales, le commerce médiéval ou l’architecture du passé.
Longtemps, l’hôtel de la Monnaie a abrité en son premier étage un musée lapidaire ainsi qu’un musée dit du Vieux Figeac. Ceux-ci ont émigré en un lieu mieux adapté aux expositions, non loin de l’église du Puy, dont nous aurons l’occasion de parler plus loin. A voir au rez-de-chaussée de l’édifice deux portails d’entrée d’époque Renaissance, dont l’un orné de sa porte de bois sculpté, provenant de l’ancien hôtel de Sully, aujourd’hui disparu.
La rue Ortabadial
C’est l’une des rues les plus pittoresques du centre historique. Elle longeait jadis la clotûre du jardin de l’abbé. D’où son nom : Ortabadial ou Orthabadial – du latin Hortus abbatialis. A l’origine, habitaient ici les domestiques et les tâcherons au service de l’abbaye.
A voir de part et d’autre de la rue les maisons anciennes dont beaucoup ont conservé, malgré les modifications et les altérations du temps, leurs caractéristiques premières. La maison du n°12 est, sans doute l’une des plus singulières de toute la rue avec son emprise au sol réduite et ses arcades de pierre à arc brisé, ouvrant jadis sur une échoppe d’artisan, encadrant aujourd’hui la devanture d’un magasin moderne.
Les trois arcades de la maison voisine n’ouvrent, quant à elles, que sur un espace libre servant de terrasse à un restaurant. Elles permettent, toutefois, de découvrir sans indiscrétion, à flanc de façade, la partie extérieure d’une souillarde. Au n°4, on remarquera la porte Louis XIV, aux panneaux chantournés, d’un immeuble d’habitation, non comme étant une œuvre d’artisanat exceptionnelle mais plutôt comme la première d’une longue série de portes de caractère, et d’âge, à découvrir tout au long de la visite.
Texte Guy Chassagnard – Photos Laurent Delfraissy