Une nouvelle place et les hôtels particuliers de la rue de Colomb
Pont et rue Gambetta, quai Bessières et rue Ortabadial, délimitent le périmètre de l’hôtel d’Anglat (XIVe), d’une famille de viguiers, à belle porte en anse de panier ouvragée, et à échauguette de surveillance, jadis en entrée de l’ancien pont du Griffoul ; de l’hôtel de Livernon, à façade gothique et croisées à moulures recoupées typiques de 1500 ; et du château de Balène, palais urbain aristocratique de 1340, dont la dynastie d’hommes d’argent et de juristes excitera la jalousie, et qui deviendra tour à tour prison, palais de justice et théâtre municipal. Sa restauration abusive de 1903 par l’architecte Paul Borie, lui conférera son allure troubadour. Remontant la rue Gambetta, au n° 47, une ancienne ruelle, son passage voûté et un porche XIVe, délivrent la cour d’un hôtel particulier à tour-escalier Renaissance, et sa galerie en loggia XVIIe. Plus haut, la façade ouvragée d’un hôtel XIVe, montre ses nombreuses fenêtres à remplage, expression d’un souci d’éclairement à l’époque gothique, et s’ouvre également sur une cour de même ordonnance, couplée à une façade en pans de bois.La place Vival créée au début du XXe an détriment de vieux logis médiévaux et à l’emplacement de l’hortus des moines, confronte les maisons à pans de bois régulièrement loties à la manière du XIIIe et l’hôtel très remanié de la Monnaie, office de tourisme et musée (arcades et baies géminées authentiques rue Ortabadial), à l’hôtel de Salgues (actuelle sous-préfecture), entre cour et jardin dans le goût XVIIIe. La rue Caviale, dont le n° 30 retient l’hôtel des Marroncles, reconstruction XVIe siècle à croisées et demi-croisées caractéristiques, opposé à la maison romane des voûtes (n° 31), ramène vers la place Carnot et son pavillon de type Baltard, édifié en 1888, en lieu et place de l’ancienne halle aux grains à arcades de pierre. Elle s’entoure d’une belle collection de maisons à soleilhos, étagées du XVIe au XIXe siècle. La maison Cisteron (XVIe) à son angle nord-ouest, à deux tourelles d’angle et soleilho à colonnade, fut la demeure d’un armurier de Louis XIV, protestant. La rue d’Aujou voisine, elle-même jalonnée de maisons médiévales, conduit vers l’hôtel de Crussol, exemplaire pour son escalier monumental (XVI-XVIIe) sur cour, à balustrade de pierre, galerie à l’italienne et soleilho à colonnade. Les Crussol d’Uzès, héritiers des Galiot de Genouillac, richissime famille de l’Ancien Régime, s’étaient portés à la tête des premiers insurgés protestants.
Par un réseau de ruelles ascendantes vers la rue Malleville, le promeneur atteint l’hôtel de la Porte, et son curieux passage voûté à tourelle et galerie de franchissement, et les pentes de la rue de Colomb. S’y échelonnent l’hôtel néoclassique de Conquans, l’hôtel d’Arnaldy et son portail à fronton sur cour (XVIIIe), les hôtels de Pailhas (1826), de Cussonel (XVIe), le bel escalier ajouré inspiré de Blois dans sa cour intérieure aux n° 4 et 6, enfin l’hôtel de Colomb, siège de la mairie de Figeac. Palais urbain d’une famille de gentilshommes verriers, les Colomb, puis d’un garde du roi Louis XVI et maire de 1808 à 1816, il montre une imposante tour-escalier Renaissance et son traditionnel soleilho à colonnes de pierre.
L’ancienne citadelle protestante et le toit des remparts
La colline de Notre-Dame-du-Puy portait jadis un premier sanctuaire, Notre-Dame-la-Fleurie, qui cédera la place à l’édifice actuel (XIIe, XIVe). Transformée en forteresse par les Huguenots, puis malmenée par les Catholiques par la suite, elle fut rétablie par son curé en 1658, autour de sa nef de 15 mètres (XVIIe), et d’un spectaculaire retable en noyer. Le portail, surmonté d’une rosace, dans une façade datant de 1345, offre à son parvis une vue étendue depuis les remparts protestants, sur la tour de l’hôtel de Colomb, la tour du Viguier et la colline de l’Aiguille. La tortueuse rue Saint-Jacques se faufile en pente et en cheminements de galets, parmi les jardinets du coteau et en retour vers la rue de Colomb.
Coiffure sommitale de la ville, les remparts sur le Champ Barthélemy, vestiges de l’ancienne enceinte à la porte de Montferrier, déploient leurs courtines scandées de tours carrées engagées. La chapelle Notre-Dame-de-la-Compassion, élevée en 1826 à l’angle de l’esplanade du Foirail, traduit le repentance de la ville face à la trahison qui permit de la livrer aux Protestants. L’épouse du premier consul d’alors, séduite par le calviniste Duras, aurait subtilisé la clef de la ville à son époux pour la remettre aux assaillants…
A l’extrémité des remparts, le haut calvaire et ses escaliers, plongent vers le boulevard Juskiewenski et ses demeures néoclassiques dotées de balcons en fonte. Le n° 7 situe la maison natale de l’acteur Charles Boyer, décédé en 1978. Plus bas, le palais de Justice et la passerelle moderne relient la ville au faubourg Saint-Martin. Extérieur aux remparts, le faubourg d’Aujou se concentrait vers le couvent des Carmes, fondé en 1340 par un Cardaillac-Brengues. C’est le seul établissement des ordres mendiants demeurant en place ; il accueille le cité administrative en compagnie de l’église Saint-Thomas, et son étrange clocher à piles rondes. L’un de ses vitraux est voué à saint Thomas Beckett, archevêque de Canterbery, qui séjourna à Figeac lors de l’occupation anglaise.
Outre ses nombreux manoirs de proche campagne, la “maison Parlante” ou Oustal Parlaïre, demeure hantée par un crime non dénoncé, ou le joli hameau de la Dausse en contrebas de la route de Villefranche, la vallée ouverte de Figeac s’engage bientôt dans le couloir aval du Célé, délaissant enseignes agro-alimentaires et zones d’activité. Les dernières terres de partage du Limargue annoncent les premières étroitures du causse…
Capdenac-le-Haut, belle accroche touristique au concours d’Uxellodunum
Du nid d’aigle guerrier il conserve l’emplacement et les attributs stratégiques d’observation sur la rivière. Capdenac, village perché, justifie le motif d’une visite pour son panorama et ses atours médiévaux. Cent mètres le séparent du niveau des eaux du Lot, et sa figure d’étrave en dit long sur le rôle initial de verrou à la solde des comtes de Rodez puis de Toulouse à son origine, par la suite sous la coupe de Simon de Montfort lors de la Croisade albigeoise. Au fil des temps, la citadelle sera plusieurs fois anglaise, royale en 1445, et plus tard protestante par Jeanne fille de Galiot de Genouillac, son seigneur au début du XVIe siècle. Place de sûreté au terme de l’Edit de Nantes, sous la gouvernance du duc de Sully éloigné de la cour, la place-forte tombera en multiples co-seigneuries à la veille de la Révolution.
Première des surprises pour le visiteur, le castrum annonce sa filiation avec Uxellodunum, dernier foyer de résistance gauloise face à Jules César, là où le parti officiel a choisi le puy d’Issolud de Vayrac ; il ne manque pas de faire valoir ses preuves archéologiques et sa “Fontaine de César”, talon d’Achille de l’oppidum et pomme de discorde des historiens… Nonobstant, la place fut à l’évidence une position retranchée, avec ses vestiges de murs de fortifications gauloises au nord, et des murailles et portes de ville constitutives du castrum médiéval. Son robuste donjon à échauguettes XIVe ouvre l’enceinte et succède à la porte nord et aux stigmates des portes avancées du bastion. Il accueille un musée regroupant les vestiges archéologiques du lieu et une statuette féminine attribuée au Néolithique. La lumineuse place Lucterius, vaste esplanade de répartition des ruelles castrales vers sa porte méridionale, oppose l’église Saint-Jean millésimée 1722, en lieu et place de la précédente (XIIIe), à l’ancienne maison consulaire et actuelle mairie. Son superbe portail XVIIe semble en remploi de la destruction de l’hôtel particulier de Sully. C’est à l’emplacement de ce dernier d’ailleurs, à l’ouest, qu’un belvédère délivre maintenant un panorama réellement flatteur sur l’aval du méandre. Des ruelles soignées reprenant le vocabulaire des maisons médiévales – la trilogie façades à pans de bois, arcades d’échoppes et portes ogivales -, assure une plaisante pérégrination (rues de la Commanderie et de la Peyrolerie) au détour d’une boulangerie et du petit musée revendicatif du site gaulois.
Au sud, la place Saint-Andrieu offre à son tour une vue pleinière sur l’aval, la ville moderne de Capdenac et sa trame ferroviaire, et propose au voisinage d’un calvaire la descente de cent marches vers la fontaine des Anglais, creusée dans le roc. La porte Vigane et sa barbacane ouvertes au sud-ouest, désignent un chemin pierreux quittant le fort, au passage des racines d’une tour romane d’avant poste à contrefort. Au pied du promontoire et au-delà des maisons de mariniers de Capdenac-Port, le hameau de Vic siège d’un lointain prieuré, accueille pour sa part l’entrée d’un canal de dérivation souterrain, creusé en 1840 pour éviter le contour dangereux du cingle ; il est devancé par un barrage et une écluse. Capdenac-le-Haut, qui fut jadis assailli par les hordes wisigothes chassées par Clovis, puis par les Sarrasins, est aujourd’hui offerte à l’invasion plus pacifique des touristes, que cette cité historique et fleurie ne manque pas d’attirer.
Fin
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Texte Ph. Pierre – DireLOT