C’est l’histoire d’un crocus cultivé de longue date dans le Quercy, et de l’épice que l’on tire de ses stigmates et que l’on dit la plus chère du monde. Un produit à la fois familier et mystérieux, qui révèle aujourd’hui une part de ses secrets.
Dans le Quercy, sa présence est ancienne. De petites parcelles, les safranières ou saffranerio en occitan, étaient dédiées à la culture de ces fleurs mauves qui éclosent à l’automne et qu’il faut récolter précautionneusement et sans attendre pour en prélever les stigmates. Après avoir été cultivé et commercialisé de manière conséquente au Moyen-Age et jusqu’à la Révolution française, le crocus sativus de son nom scientifique a failli disparaître du Quercy. La culture du safran devient familiale, ne prétend plus à la vente et les petits bulbes à la pellicule fibreuse se tapissent le long des murets de pierres sèches. Les causses sont le conservatoire d’une plante en sommeil. Jusqu’à ce qu’à la fin des années 1990 un regain d’intérêt pour les pratiques vernaculaires réveille la belle endormie.
« La culture du safran reste mystérieuse par bien des aspects. » – Didier Burg
Vingt ans plus tard, le safran s’affiche, se revendique, se discute… Cajarc, commune de 1100 habitants entre vallée du Lot et causses calcaires, en est la capitale. Des producteurs sont réunis dans l’association des Safraniers du Quercy, qui compte aujourd’hui une soixantaine de membres. Ils cultivent le safran dans la zone qui correspond au « Quercy antique », dépassant les limites du département du Lot, dans le nord du Tarn-et-Garonne, dans le Lot-et-Garonne, en Aveyron et jusqu’en Dordogne. Toutefois, « 70 à 80 % des producteurs sont concentrés à moins de 20 km de Cajarc » précise Didier Burg, président de l’association. Leur production varie de 10 à 15 grammes pour les plus petites productions à 800 grammes, voire plus, pour les plus conséquentes. En 2020, la production des Safraniers du Quercy était d’environ 3,3 kilos, auxquels s’ajoutent les résultats de safraniers non membres de l’association. « Tout dépend des années », insiste Didier Burg. « La culture du safran reste mystérieuse par bien des aspects. » Météo, terrain, maîtrise de la culture et même condition de récolte… jouent sur la quantité et la qualité du produit. Didier Burg, qui en cultive depuis la fin des années 1990, n’a pas oublié ce que lui avait alors dit une cultivatrice aguerrie, parmi les rares personnes à en faire encore la culture à cette époque : « chaque année, tu auras des surprises ». « Pour le safran, on ne peut pas faire de fiche technique de culture » confirme Didier Burg, après plus de vingt ans de récolte.
Picrocrocine et safranal
En cuisine aussi, l’épice se fait insaisissable. « Le safran est très prisé, mais pas du tout maîtrisé » prévient le chef étoilé de Cajarc, Claude-Emmanuel Robin. En 2017, lorsqu’il prend la présidence du label « Cajarc Cité Safran du Quercy » comme Site Remarquable du Goût, il pose sa condition : « que je puisse comprendre le safran ». « Car il ne s’agit pas seulement de bien le cuisiner, il faut le comprendre » insiste le chef de L’Allée des Vignes. Pour cela, il se tourne vers des scientifiques de son entourage et procède à des analyses pour étudier les propriétés organoleptiques du… pour découvrir l’article intégral et les 60 pages de notre magazine, commandez le ici : https://direlot.fr/boutique/direlot/direlot-259-mai-juin-2021/
Texte Hélène Ferrarini – Photos Olivier Arsandaux sauf mention