Cet imposant édifice, dont Prosper Mérimée dit qu’il « constitue un résumé des arts du Moyen Âge », s’élève à l’extrémité d’un plateau rocheux dominant le pays des quatre rivières, Cère, Bave, Mamoul et Dordogne, aux confins nord de la province de Quercy.
Le château, « dentelure de pierre de couleur sanguine » selon Pierre Loti, domine un bourg castral attesté depuis le XIIIe siècle, dont le fleuron est la collégiale Saint-Louis, édifiée au début du XVIe siècle par Jean II de Castelnau-Caylus. Enclavée entre la vicomté de Turenne et le comté d’Auvergne, la Baronnie de Castelnau relevait du comté de Toulouse dès le XIe siècle.
Mentionnée dans le cartulaire de l’Abbaye de Beaulieu sur Dordogne dès le VIIIe, la baronnie s’affirme avec l’édification du premier château neuf dès 1100, par Hugues, puis Gerbert, puis Gerbert II qui fut évêque de Cahors. Après d’âpres luttes féodales avec les Turenne, les Castelnau obtinrent de relever directement des Rois de France en 1280 (Philippe II Le Hardi, puis Philippe IV le Bel en 1308). Castelnau était alors une place stratégique, et c’est au XIIIe que furent édifiés la tour-résidence et le donjon, de pierre rouge et ocre, qui dominent toujours le site. Cette famille va connaître alors une forte ascension, d’abord par son alliance avec les Calmont d’Olt, seigneurs d’Espalion et de St-Côme en Rouergue, puis par le mariage d’Hugues de Castelnau avec la nièce du pape Jean XXII au début du XIVe, enfin au XVe avec les Caylus. En 1530, l’héritière des Castelnau-Caylus apporte la baronnie aux Clermont-Lodève.
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En 1715, la succession échoit à la baronne Jeanne d’Albert de Luynes, puis aux Ducs de Luynes en 1756. Les Luynes vendront finalement le château et les terres en 1830.
Les constructions initiales furent complétées tout au long des XIVe, XVe et XVIe siècles, suivant les charges des barons de Castelnau, Jean II Chambellan de Louis XI, puis Jacques, auprès de Louis XII pendant les guerres d’Italie. Le château acquit alors sa configuration quasi-définitive, avec l’adjonction de trois corps de logis cantonnés de tours, complétés d’une puissante tour d’artillerie, l’ensemble protégé par une enceinte basse et des fossés. Une troisième enceinte entourait le bourg entier, il en subsiste une porte fortifiée et quelques vestiges.
Le corps de logis accolé au XIVe à la tour-résidence comporte au rez-de-chaussée, ouvrant sur la cour intérieure par une large porte gothique, la chapelle castrale. Constituée de deux travées voûtées de croisées d’ogives, elle était entièrement peinte de scènes de la Passion et de la Résurrection dont il reste seulement des traces. Elle a toutefois conservé l’essentiel de ses boiseries et de son mobilier gothique, notamment le magnifique panneau d’autel polychrome. De cette époque aussi, le châtelet d’entrée, avec au-dessus du passage une salle haute voûtée de fines ogives retombant sur d’élégants chapiteaux à feuillage.
Les logis est et nord, ajoutés au XVe, ferment la cour intérieure et donnent à l’ensemble son plan triangulaire.
À la fin du XVIe, suivant l’évolution des techniques, des casemates équipées de chambres de tir, et des bastions à canonnières carrées « à la française » ont renforcé le chemisage des tours et les courtines, rendant très difficile toute approche du château. Les Clermont-Lodève, en particulier Alexandre, menèrent pendant tout le XVIIe d’importants travaux transformant l’austère château-fort en résidence luxueuse, dotée de larges ouvertures, d’un grand balcon d’honneur ouvrant sur la vallée, et d’une grande galerie sur arcades où se donnaient des fêtes dont le poète François de Maynard et des Capitouls toulousains étaient des habitués.Leurs descendants se désintéressèrent de Castelnau, préférant leur hôtel parisien et leur château de Clermont (Clermont l’Hérault aujourd’hui), bien que leurs possessions du Quercy continuent à les fournir en paniers de truffes, comme prévu dans les baux à ferme encore en 1782.
Amputé des défenses du châtelet et du pont-levis en 1793, partiellement démantelé et pillé de ses archives, le château évita la démolition totale en 1844 grâce à l’intervention du préfet du Lot, et de l’Inspecteur Calvet, de la récente Commission des monuments historiques. Il fut hélas victime d’un incendie ravageur au début de 1851, qui détruisit l’essentiel des aménagements du XVIIe siècle.
Classé monument historique en 1862, le château-fort ruiné fut enfin racheté en 1896 par celui qui allait le sauver, Jean Mouliérat, ténor de l’Opéra-Comique de Paris. Celui-ci consacra sa fortune et son énergie à relever le château, à en restaurer et aménager l’intérieur, ainsi qu’à le meubler. Il y réunit une importante collection très diverse de mobilier, peintures, tapisseries, statuaire et objets d’art de toutes les époques, ainsi qu’un dépôt lapidaire remarquable.
Jean Mouliérat, artiste, amateur d’art et humaniste, reçut à Castelnau Rodin, Colette, de grands noms de la vie politique et culturelle, ainsi que la dernière reine de Madagascar, Ranavalo….Il s’éteint en 1932, après avoir avec l’assistance de son ami Ministre Anatole de Monzie, fait don à l’État du château et des collections.
Selon sa volonté, les appartements que l’on visite aujourd’hui présentent l’ensemble du mobilier et des objets d’art dans la disposition qu’il avait lui-même choisie.
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